top of page

Bienvenue au Chili !

Rattachez votre ceinture, remarchez sur des trottoirs bordés de peupliers et veuillez traverser au vert. Bienvenue au Chili !

Dans le bus, un policier monte nous dire à tous de mettre notre ceinture. Il passe dans les rangées et vérifie.

La première ville chilienne fut un choc. Des érables et des châtaigniers bordent des trottoirs propres. Les couleurs sont celles de l’automne. Depuis la vitre du bus, nous observons les allées et venues de la population. Les femmes ne portent plus de grandes jupes mais des jeans saillants et leurs bébés ne sont plus transportés dans des draps de couleurs mais dans des poussettes. Les gens fument des cigarettes et vont de paire avec une voiture. Nous redécouvrons les autos écoles, les sushis et le bon vin. Bienvenue au Chili.


Depuis Uyuni et le tour du Salar beaucoup de kilomètres se sont écoulés. Le tour terminé nous avons attendu de longues heures notre bus de 4 heures du matin pour la frontière chilienne. Puis de longues heures dans le bus et à la frontière. Les chiliens sont connus pour leurs contrôles et leur intransigeance face à tous fruits, légumes, plantes etc. Quatorze heures plus tard nous avons posé le pied en terre chilienne. Manque d’attention, fatigue, faute à pas de chance, nous nous sommes fait voler un de nos petits sacs à la descente du bus. Suivi toute suite logique après un vol : blocage des cartes bleues, déposition aux « carabineros » (police chilienne) et révision des plans. Nous avons laissé de côté San Pedro de Atacama et avons filé vers Santiago. Vingt deux heures de bus et 1500 km de désert plus tard nous sommes arrivés à la capitale. Chanceux dans notre malchance nous sommes chaleureusement accueillis chez Lorena, une chilienne rencontrée en Équateur, et son cousin Rodrigo.


Santiago


En quelques jours, nous changeons de saison. L’hiver est désormais là et le sud ne rime plus avec chaleur.

Nous entamons les démarches pour une nouvelle carte bancaire et pour le passeport de Ségo à l’ambassade. Ce fut assez étrange. L’entrée gardée par un policier français à l’accent du sud prononcé, le portrait de notre président accroché sur les murs et les employés parlant français nous ont fait revenir, pendant plusieurs minutes, chez nous, en sécurité. On ne vous cachera pas que pendant quelques jours nous avons hésité à revenir en France. Mais nous avions juste besoin de sommeil et de nous changer les esprits. Pendant une semaine, il nous parut impossible d’ouvrir les yeux avant 10 heures du matin, cela effaçant petit à petit les cernes récemment apparues. Les journées s’enchaînent dans l’attente de la carte bleue. Nous visitons Santiago, ville au style européen, et dégustons des fruits de mer en compagnie de Jessica, rencontrée également en Équateur.


Puis un immense événement approche : la finale de la Copa America entre le Chili et l’Argentine. Les argentins partent favoris. Même chez nos amis chiliens, personne n’ose croire ou prononcer le mot « victoire ». Toute la journée nous nous affairons à la préparation d’un « asado » (barbecue). Quelques cinq kilos de viande sont achetés, accompagnés de trois bouteilles de vin, de bières, de pisco (alcool fort chilien) et de salades composées. Des crêpes préparées par nos soins couronnent le repas.

  • « Combien serons-nous ce soir ?

  • Six

  • Woua ! »

Nous devons attendre les tirs aux buts et un suspens intenable pour assister à la victoire du Chili. Sous des airs et rythmes de triomphe « Chi Chi Chi Le Le Le – Viva Chile » nous sortons avec nos amis sur la place la plus proche, fêter comme il se doit cette Copa America. Des centaines de voitures et de personnes, klaxonnent et défilent dans la rue, sourires aux lèvres. Nos brefs souvenirs de 1998 nous reviennent en mémoire. Après une telle soirée (qui avait commence à 15h00), le corps s’effondre sans poésie.


…


Un matin, peu après 10h, alors que nous peinons encore à ouvrir un œil, notre lit se met à trembler, on entend pendant trois secondes le bruit du verre et du métal cliqueter. Nous venons de vivre notre premier tremblement de terre !


…


Un soir nous organisons une petite soirée autour d’un gratin dauphinois et d’une bouteille de vin. Rodrigo prépare un ceviche en entrée et ouvre une bouteille de pisco. Nous leur offrons quelques cadeaux de remerciement achetés plus tôt dans l’après midi. La soirée se passe bien et la pièce, d’habitude froide, se réchauffe. Ou bien est-ce l’alcool qui monte ? Tous se régalent. Au cours de la soirée, Rodrigo nous propose de nous emmener à Valparaíso le lendemain, de nous faire découvrir la ville et d’y retrouver Jessica. Nous acceptons sans hésiter, et peut être qu’à notre retour la carte sera là…


Valparaiso est une ville portuaire, agréable sans être spectaculaire. Le centre ville comporte quelques édifices historiques mais la vraie beauté et l’originalité de la ville se trouve en haut de ses collines, appelées « cerro ». On y accède depuis le front de mer par des ascenseurs, sorte de funiculaires. Plusieurs cerros dominent la ville. On y découvre des rues « taguées », où des milliers de personnages envahissent les murs et des formes colorées et artistiques égaient notre visite.

Ce jour là, nous comprenons ce que signifie « une mer de nuages ». Depuis une colline, nous observons une brume dense, avaler la baie de Valparaiso. Les bateaux partant du port paraissaient flotter sur cette mer de nuages.


Après plus d’une semaine d’attente, nous finissons par ne plus espérer l’arrivée de la carte bleue. Nous décidons de continuer notre voyage vers le sud, tout en restant en contact avec Rodrigo et Lorena au cas où la carte se montrerait.


…

A 300km au sud de Santiago

Ce matin nous partons sous un crachas permanent et froid qui nous gèle les joues. Nous sommes comme des chiens mouillés sur le bord de la route. En trois heures de stop nous n’avançons que d’une trentaine de kilomètres, grâce à trois voitures. Nous avançons en saut de puce, d’une sortie d’autoroute à une autre. Des vendeurs d’écrevisses semblent être dans la même situation que nous, attendant qu’une voiture veuille bien s’arrêter.


On ne sait jamais qui va nous aider. Que devons nous dire face à une aide sincère venue d’une personne que nous apprécions peu ?

Claudio et Nancy nous prennent en stop quand une éclaircie faisait place à une journée pluvieuse. A bord d’une Citroën nous partons pour trente kilomètres, quand le couple nous convainc de venir avec eux, admirer une cascade voisine. Deux jours auparavant, il n’y aurait pas eu une seule caméra pour cette cascade, mais les averses de ces dernières vingt quatre heures ont métamorphosé la rivière et la cascade… Le lieu vaut le détour.

Claudio approche la cinquantaine. Il a tout de la bonne pate, du caractère en plus. Un peu d’embonpoint et l’air rieur qu’ont souvent les chiliens. Il cherche de la main celle de Nancy. Celle-ci avait tout d’une princesse, bien que modeste. Lunettes, maquillage, bien habillée, de grandes bottes.


  • « Vous êtes sûr que vous voulez poursuivre vers le sud aujourd’hui ? Parce que sinon, je vous aurais bien invité chez moi.

Nous acceptons rapidement sa proposition.

  • « Demain, vous prendrez mes vélos et vous ferez un tour dans la ville

  • Ok ! »


Plus nous parlions et plus nous avions l’impression que seul Claudio existait dans le couple. Parlant de sa voiture, de sa maison… Nancy ne s’exprimait pas beaucoup. Pendant les deux heures de trajet pour arriver chez eux, Claudio se fait professeur d’histoire. Claudio nous regarde dans le rétroviseur en pointant son index vers le ciel, nous jurant avec verve que le Chili n’a jamais été colonisé.

« El unico pais en el mundo!! » répétait il comme pour se convaincre lui même. Bien qu’exagéré, nous pouvions comprendre cette fierté. Les Mapuches ont vraiment été le seul peuple « préhispanique » à résister aux espagnols. Ils ont su garder toute la moitié sud du pays libre, et ce pendant très longtemps. Le fleuve Bio-Bio marquait la frontière et c’est justement là qu’habitent Claudio et Nancy.


Arrivés chez eux, le couple nous accueille chaleureusement et aussi méthodiquement que l’aurait fait la réception d’un hôtel, nous expliquant tout du fonctionnement de leur maison. Leur naturel nous donne l’impression qu’ils ont déjà hébergé une centaine de personne. Il n’en est rien, nous sommes les premiers.

Concepción


Rien d’extraordinaire dans cette ville moderne dont Claudio nous vantait pourtant la beauté. L’embouchure du fleuve Bio Bio vaut par contre le déplacement. Malgré le mauvais temps, le vent forme de belles vagues qui appellent les surfeurs à sortir. Au bout de la plage, nous découvrons une caverne de pirates où des os de baleines sont nichés dans des crevasses.


Grâce à l’un de ses amis camionneurs, Claudio nous organise notre prochain trajet. Nous avons rendez vous avec Victor à 22h dans son entrepôt. A 23h nous partons. Notre chauffeur est un homme droit et poli. Avant de nous faire monter dans sa cabine il revoit l’organisation de son espace, comme nous l’aurions fait avant d’inviter des amis chez nous. Il fait parti de ses personnes qui même quand nous ne les regardons pas, se réjouissent que leurs maisons soit bien rangées. Réajustant l’angle d’un stylo, l’alignement de ses documents, notre homme affiche une satisfaction toute décomplexée.

Vers 3 heures du matin, notre homme s’arrête sur une aire d’autoroute. Il nous annonce que notre sortie est la prochaine et que lui continuera vers le sud après s’être reposé une heure. A ce moment là, on se dit qu’on a le chic pour se mettre dans des situations compliquées. Nous restons avec Victor, lui dans son lit, nous à l’avant. Impossible de dormir mais au moins la cabine nous protége du froid. A 4h, nous sortons. Voulant nous reposer un peu plus avant de repartir, nous cherchons un lieu pour notre tente. Nous ne trouvons rien de plus qu’une petite aire de repas caillouteuse et humide.

Vers 7 heures du matin, nous sommes réveillés par un garde, un peu énervé. Un panneau indiquait l’interdiction de camper, à deux mètres de la tente et nous ne l’avions pas vu. En moins de deux minutes nous replions nos affaires, la tente humide et partons. Nous marchons alors sur la bande d’arrêt d’urgence sur deux kilomètres, non sans quelques frissons. Nous arrivons à notre sortie pour les premières lueurs du jour. Heureusement, la première voiture qui passe nous enlève à notre errance. Une voiture de plus et nous arrivons à Pucon, notre objectif.


Région des lacs


Arrivés à Pucon nous nous mettons en quête d’une auberge. Nos dernières références en terme de prix étant celles de la Bolivie, nous avons la surprise de constater qu’ici le prix est multiplié par quatre. Mais au moins le chauffage est présent. Nous passons plusieurs jours dans cette petite ville sur les bords du lac Villarica dans une auberge à l’ambiance agréable, tenue par un frère et une sœur. Entre deux jours de pluie continue nous partons découvrir le parc Huerquehue … en raquette ! De la neige jusqu'au genou nous contemplons les lacs gelés et les arbres blancs. Nous profitons de cet hiver manqué.


A notre départ nous avons le plaisir de découvrir la cime du volcan Villarica et tentons d’imaginer le spectacle de la dernière éruption quatre mois plus tôt.


Notre dernière étape dans cette région se fait à Puerto Varas, à 300km au sud de Pucon, bordé par le lac Llanquihue et entouré des volcans Osorno et Calbuco.

Une auberge familiale nous accueille lors de l’anniversaire du fils du propriétaire. Une part de gâteau et nous faisons partie de cette famille agrandie que forment les voyageurs.

Nous installons notre tente sur un énorme matelas de gymnastique, sous un mur d’escalade, dans un espace protégé de la pluie. Nous nous baladons, entre deux éclaircies, admirant les vestiges architecturaux au curieux style allemand, très présent dans la région.

Un peu plus au sud nous attend l’île de Chiloé.

  • « Vous allez à Chiloé ? Vous allez voir, il pleut tout le temps ! »

Ça promet !


bottom of page